mercredi 10 octobre 2012

Invitation au voyage ...

   Alors qu’un peu partout dans le monde, les médias donnent du monde arabe une image quelque peu déformée, cette anthologie,  Les Odes du désert , se présente comme une fenêtre amicalement ouverte sur une culture différente, riche de plusieurs siècles d’une poésie qui  trouva sa source et prit son envol dans le désert...
 
  Le recueil nous fait voyager dans le temps, en collant scrupuleusement à la chronologie des divers mouvements qui ont fait évoluer la poésie arabe. Chaque extrait proposé est soigneusement choisi. La plupart des auteurs évoqués sont inconnus du lectorat occidental. Ils méritent cependant d’être aujourd’hui découverts et appréciés, au même titre que l’incontournable Khalil Gibran, poète invité parmi d’autres dans « Les Odes du désert », dont la philosophie poétique enchante depuis des lustres les yeux de l’Occident.
 
  La poésie des premiers temps de cette culture arabe parvenue jusqu’à nous, que l’on pourrait qualifier d’élémentaire, dans le sens où elle chante les éléments de la nature, plonge tous nos sens dans la vie des tribus du désert, pas si désertique que ça, qui recèle même des trésors en son sein : « Telle encore est l’odeur des fleurs que les rosées du ciel ont fait croître dans une prairie dont jamais les troupeaux n’approchent, qui n’est pas souillée par le passage des animaux ; Une prairie souvent arrosée par des nuées chargées d’une onde pure, qui rendent les petites cavités dans lesquelles l’eau repose semblables à autant de pièces d’argent. » (Extrait d’un poème d’Antara).
 
   Autre point, plus étonnant, de cette poésie : l’on voit se dessiner au fil des siècles le portrait d’une femme à visage découvert, aimée, respectée et le plus important, libre comme l’air... fantasme de certains poètes ouvertement libertins, tel  Tarafa : « Pour nous l’échancrure de sa robe est hospitalière, et sa peau nue s’offre aux attouchements des buveurs. Quand nous la prions de chanter, elle module un air langoureux et fredonne à mi-voix, les yeux clos. » Il n’est donc pas étonnant que cette poésie ait évolué au cours des siècles, devenant nettement plus engagée à notre époque : le poète est en effet le témoin privilégié de son époque et n’hésite pas à en dénoncer les travers ou la régression au moyen de ses vers, qui peuvent alors devenir de véritables armes. C’est le cas notamment pour Aboulkacem Chabbi : « Lorsqu’un jour le peuple veut vivre, /  Force est pour le Destin, de répondre, / Force est pour les ténèbres de se dissiper, / Force est pour les chaînes de se briser. »
 
   Au final, cette anthologie atteint parfaitement son objectif d’invitation à la découverte de l’autre et de sa culture. On ne peut en ressortir qu’enrichi, car s’ouvrir à l’autre, c’est aussi s’ouvrir à soi-même...
 
© Marie Fontaine

 

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