Alors qu’un peu partout dans le monde, les médias donnent du monde arabe une image quelque peu
déformée, cette anthologie, Les Odes du
désert , se présente comme une fenêtre amicalement ouverte sur une culture différente, riche de plusieurs siècles d’une poésie qui
trouva sa source et prit son envol dans le désert...
Le
recueil nous fait voyager dans le temps, en collant scrupuleusement à
la chronologie des divers
mouvements qui ont fait évoluer la poésie arabe. Chaque extrait
proposé est soigneusement choisi. La plupart des auteurs évoqués sont
inconnus du lectorat occidental. Ils méritent cependant
d’être aujourd’hui découverts et appréciés, au même titre que
l’incontournable Khalil Gibran, poète invité parmi d’autres dans « Les
Odes du désert », dont la philosophie poétique
enchante depuis des lustres les yeux de l’Occident.
La
poésie des premiers temps de cette culture arabe parvenue jusqu’à nous,
que l’on pourrait qualifier
d’élémentaire, dans le sens où elle chante les éléments de la
nature, plonge tous nos sens dans la vie des tribus du désert, pas si
désertique que ça, qui recèle même des trésors en son
sein : « Telle encore est
l’odeur des fleurs que les rosées du ciel ont fait croître dans une
prairie dont jamais les troupeaux n’approchent,
qui n’est pas souillée par le passage des animaux ; Une prairie
souvent arrosée par des nuées chargées d’une onde pure, qui rendent les
petites cavités dans lesquelles l’eau repose
semblables à autant de pièces d’argent. » (Extrait d’un poème d’Antara).
Autre
point, plus étonnant, de cette poésie : l’on voit se dessiner au fil
des siècles le
portrait d’une femme à visage découvert, aimée, respectée et le plus
important, libre comme l’air... fantasme de certains poètes ouvertement
libertins, tel Tarafa : « Pour nous l’échancrure de sa robe est hospitalière, et sa peau nue s’offre aux attouchements des
buveurs. Quand nous la prions de chanter, elle module un air langoureux et fredonne à mi-voix, les yeux clos. »
Il n’est donc pas étonnant que cette poésie ait évolué au cours des
siècles, devenant nettement plus engagée à notre époque : le poète
est en effet le témoin privilégié de son époque et n’hésite pas à en
dénoncer les travers ou la régression au moyen de ses
vers, qui peuvent alors devenir de véritables armes. C’est le cas
notamment pour Aboulkacem Chabbi : « Lorsqu’un jour le peuple veut vivre,
/ Force est pour le Destin, de répondre, / Force est pour les ténèbres de se dissiper, / Force est pour les chaînes de se briser. »
Au final, cette anthologie atteint parfaitement son objectif d’invitation à la découverte de l’autre
et de sa culture. On ne peut en ressortir qu’enrichi, car s’ouvrir à l’autre, c’est aussi s’ouvrir à soi-même...
© Marie Fontaine
Source : http://darklimelight.over-blog.com/
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